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Voyager par le train

2017-09-18

中国与非洲(法文版) 2017年9期

Voyager par le train

En attendant de prendre la nouvelle ligne Mombasa-Nairobi au Kenya par Hannah Ryder

Tous à bord de la nouvelle ligne Mombasa-Nairobi.

QUAND j’étais enfant à Nairobi, la capitale du Kenya, les vacances familiales annuelles sur les pIages magnifiques de Mombasa commençaient et se terminaient toujours avec beaucoup d’excitation. Ma sœur et moi sautions dans la voiture et pendant le trajet sur cette route à deux voies connue pour être dangereuse, nous nous occupions en faisant signe aux autres conducteurs ou en comptant les nids de poule. « Quand j’ai été assez grande pour conduire, Ie gouvernement avait reçu des fonds de la Banque mondiale et de l’Union européenne pour en faire une autoroute à quatre voies et combler les nids de poule, sauvant ainsi de nombreuses vies. »

Une transformation semblable a eu lieu sur la ligne de chemin de fer qui suit le même trajet de Nairobi à Mombasa et qui connaît une nouvelle vie grâce à une société chinoise.

Mémoires coloniales

La dernière fois que j’ai emprunté cette ligne, c’était avec mon mari lors de sa première visite au Kenya. Je voulais l’impressionner et le fait de prendre un vieux train couchettes sur une voie construite entre 1896 et 1901 par les britanniques me semblait une option romantique, comparée à une heure de vol ou un trajetdans un autocar de nuit.

Des passagers profitant de la nouvelle ère des voyages en train au Kenya.

Les exploitants de la ligne tentaient de leur mieux de recréer cette période coloniale, avec des draps blancs confortables, et des couvertures neuves dans les couchettes, ainsi que des œufs et des toasts pour le petit-déjeuner dans le wagon-restaurant. Malgré tous leurs efforts, le train était vieux et poussif. Par ailleurs, ce que les exploitants ne pouvaient pas prévoir, c’est qu’un éléphant sur la voie retarderait le train de sept heures. Nous avons été soulagés d’apprendre peu après que 1’Afrique du Sud et la Turquie évaluaient les possibilités d’investissement sur cette ligne, en souhaitant une issue favorable et rapide.

Malheureusement, ces investissements ne se sont pas matérialisés. Le gouvernement kenyan a lancé un appeI d’offres en 2013 pour améIiorer Ia Iigne, décidant qu’il était temps de réduire le trajet entre Nairobi et Mombasa pour le faire passer à quatre heures – pour le transport des passagers et des marchandises – et ainsi accroître le tourisme et le commerce. Le projet avait aussi pour objectif de réduire le nombre des camions et des voitures sur l’autoroute. C’était une vision pour une croissance plus respectueuse de l’environnement que la Chine a reconnue en procédant à un investissement de 3,8 miIIiards de doIIars.

Des prix accessibles

Certains commentateurs, au Kenya et à l’étranger, ont critiqué le fait que le coût de ce projet était trop élevé, notamment si on le compare à d’autres lignes construites ailleurs dans le monde. D’autres ont néanmoins justifié Ie coût en précisant qu’iI comporte des modifications pour en faire une Iigne sur-mesure, comme par exemple des ponts supplémentaires pour éviter de perturber ou de faire fuir la faune sauvage. Au moins, il n’y aura plus de problèmes avec les éléphants. Mais un bon indicateur du rapport coût/quaIité, c’est de comparer le prix du billet à ce qu’il coûtait auparavant. Un billet en première classe coûte environ 30 dollars, et 9 dollars en seconde classe, des prix comparables à ceux de l’autocar de nuit. À ces prix-là, plus de 75 000 Kenyans ordinaires, dont mes cousins, ont déjà fait des déplacements pour la journée, se prenant en photo dans les nouveaux sièges confortables.

Des défis subsistent

Certains commentateurs ont aussi souligné l’endettement du Kenya dans la construction de cette nouvelle ligne, tout comme ils s’inquiètent des extensions prévues vers des pays enclavés du continent africain comme l’Ouganda et le Rwanda. Ce qu’ils évitent de dire, c’est qu’en termes de ratio dette pubIique/PIB, le Kenya est en 77e position selon le Forum économique mondiale, mieux que de nombreux pays européens comme la Grande-Bretagne et l’Allemagne. Sans même parler des prévisions du Fonds monétaire international, qui indiquent que le PIB kenyan devrait croître de 6 % en 2017, moins rapidement que Ia Chine ou que son voisin éthiopien, mais à un rythme bien plus élevé que celui des États-Unis et de l’Europe en général. Mes amis ougandais et éthiopiens attendent aussi avec impatience que les nouvelles voies qui les relieront à leur pays soient construites.

Ceci dit, tout n’a pas été facile avec cette nouvelle ligne et je ne peux pas imaginer que tout ira bien à l’avenir. Il y a eu des disputes sur le nombre de Kenyans qui ont été empIoyés dans ce projet, et I’efficacité des dispositifs pour la maintenance doit être constamment supervisée. Heureusement, le Kenya s’enorgueillit d’une culture très ouverte et d’une société prospère, et quand bien même tout problème prendrait rapidement de l’importance, le gouvernement et ses partenaires chinois pourront les résoudre tout aussi rapidement.

Cette modernisation me rend très enthousiaste et j’attends avec impatience d’aller au Kenya et de me joindre à d’autres pour mon voyage inaugural le long de cette ligne pittoresque, dans le confort et non dans la peur. Et cette fois-ci, sans les éléphants ! CA

(L’auteure est une diplomate, économiste et écrivaine kenyane et britannique)