un zootechnicien chinois au Mozambique
2017-08-07UnecollaborationdeterrainparLiXiaoyu
Une collaboration de terrain par Li Xiaoyu
un zootechnicien chinois au Mozambique
Une collaboration de terrain par Li Xiaoyu
POUR Vasco Silva, technicienne en élevage
de la province de Maputo au Mozambique, située à l’extrême sud du pays, l’insémination artif i cielle bovine (IAB) a toujours été une technique diff i cile à maîtriser. Pourtant, grâce à la formation accélérée de cinq jours qu’elle a suivie, entre le 5 et le 9 décembre 2016, la donne a changé. « Avec ces cours, l’IAB n’a plus de secret pour moi et l’expert chinois m’a même félicité pour cela », raconte-t-elle avec enthousiasme.
Cet expert chinois, c’est Fu Youqing. Arrivé au Mozambique en novembre 2015 pour une mission de deux ans, Fu a travaillé pendant près de trente ans comme zootechnicien, dans la province du Hubei. Et c’est la première fois qu’il participe à un programme de coopération agricole en Afrique. Son travail quotidien consiste désormais à transmettre ses connaissances aux éleveurs locaux, à travers la mise en place de formations pratiques. L’objectif ? Améliorer la productivité et contourner l’obstacle de la sous-mécanisation, très présente dans le pays.
Pour notre expert, le faible rendement de l’élevage mozambicain résulte principalement de sa dépendance au pâturage naturel. Pragmatique, il s’attèle donc à initier les éleveurs locaux aux techniques permettant d’assurer un approvisionnement équilibré toute l’année, comme l’ensilage. Rappelons qu’en 2016, sous l’impact du phénomène climatique El Niño, le Mozambique a ainsi connu un épisode de sécheresse dramatique, causant la mort de centaines de milliers de bêtes et une perte économique majeure pour les éleveurs. « Avec une technique comme l’ensilage, on aurait pu éviter une telle catastrophe », insiste-t-il.
De fait, une centaine de personnes ont pu prof i ter de formations jusque-là, en se servant de machines agricoles fournies par le gouvernement chinois. Machines qui permettent, par ailleurs, un gain de temps et une homogénéité considérables, en comparaison des méthodes traditionnelles.
Felix King, responsable technique à l’Institut de recherche agricole du Mozambique, explique : « Chaque année, nous voyons beaucoup d’experts étrangers venir nous aider. Mais comme ils sont soumis à des contraintes matérielles et techniques, leur travail n’aboutit pas toujours aux résultats escomptés. Les experts chinois, eux,ont une approche pratique très intéressante que nous pouvons mettre en place sur le terrain. »
Fu Youqing en train de réaliser une insémination artif i cielle bovine.
Un constat d’ailleurs partagé par Avelino Sebastiao Nhate, responsable du centre d’essai sur les techniques d’élevage de Chobela, dans la province de Maputo : « Cette formation a permis de renforcer les compétences pratiques de nos techniciens agricoles. Nous sommes en train de jeter des bases solides pour l’avenir, et notamment pour l’amélioration de la qualité d’espèces bovines. »
De l’huile de coude et de la volonté
Bien sûr, le travail sur le terrain reste parfois délicat. Le manque de machines simples d’utilisation, adaptées et économiques – à l’instar de machines de coupe de pailles ou de moissonneuses-lieuses de petite et moyenne taille – étant la principale diff i culté que rencontre Fu Youqing. « La plupart des régions mozambicaines n’ont pas accès à l’électricité, et ne sont pas desservies correctement. En conséquence, beaucoup de paysans manquent de moyens pour utiliser de machines », explique-t-il.
Chaque année, nous voyons beaucoup d’experts étrangers venir nous aider. Mais comme ils sont soumis à des contraintes matérielles et techniques, leur travail n’aboutit pas toujours aux résultats escomptés. Les experts chinois, eux, ont une approche pratique très intéressante que nous pouvons mettre en place sur le terrain.
Felix King, responsable technique au Centre des sciences et technologies animales relevant de l’Institut de recherche agricole du Mozambique
Par ailleurs, le fait que les normes de construction soient spécif i ques à chaque pays, oblige – dans des cas de panne, par exemple – à développer des trésors d’ingéniosité pour réparer. Le zootechnicien se souvient encore les efforts drastiques qu’il a dû déployer pendant près de vingt jours pour trouver une simple poulie de hache-paille, adaptée à son matériel. Et les anecdotes comme celle-ci sont nombreuses. Aussi, suggère Fu Youqing, il est impératif d’équiper systématiquement les machines chinoises qui sont utilisées dans le cadre de ce programme, de pièces de rechange et de proposer un meilleur suivi, plus facilement accessible, en cas de panne.
S’adapter aux besoins du terrain, une priorité
D’un point de vue très concret, et de par son expérience, le zootechnicien s’est rendu compte que les éleveurs locaux n’étaient pas forcément en attente de technologies de pointe dans le cadre d’un programme de collaboration et d’échange tel que celui-ci. À ce titre, on peut, par exemple, mentionner le transfert embryonnaire bovin (TEB), une technique avancée destinée à améliorer la qualité des espèces par un processus de sélection, que le Mozambique ne peut ni développer, ni commercialiser pour l’instant, faute d’installations adéquates dans les laboratoires ou de réseaux de distribution appropriés.
À tout cela, s’ajoute des différences de perceptions avec lesquelles il faut composer, à l’instar de certains éleveurs qui pensent que la collaboration se fait sur la simple base f i nancière. Mais ce n’est pas l’objectif premier du programme et il faut parfois le rappeler, en faisant preuve de beaucoup de f i nesse. « Dans ce genre de situation, je n’hésite jamais à expliquer en détail notre méthode de travail, qui repose avant tout sur le partage et la transmission de nouvelles connaissances. Mais de manière générale, le principe fonctionne puisque la compréhension est mutuelle aujourd’hui », a rappelé Fu Youqing, pour qui la discussion et l’ouverture d’esprit sont un gage de réussite.
Mais en dépit de toutes ces apparentes diff i cultés, le zootechnicien chinois ne s’est jamais départi de son courage : « J’aurais vraiment eu beaucoup de regrets de ne pas pouvoir découvrir ce pays magnif i que. Ses habitants – et leur sourire ! – sont fabuleux et les paysages sont tout simplement extraordinaires. Tout n’est peut-être pas rose, mais avec de la patience et de la réf l exion, je sais que nous pouvons accomplir de grandes choses tous ensemble ! »
Patience, réf l exion et bonne volonté, soit tous les ingrédients d’une collaboration réussie… Et c’est bien ce que Fu Youqing démontre chaque jour un peu plus sur le terrain. CA
Pour vos commentaires : lixiaoyu@chinafrica.cn