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Relations franco-chinoises en Afrique

2017-08-07

中国与非洲(法文版) 2017年6期

Relations franco-chinoises en Afrique

Patrick Sevaistre

avec l’initiative des « nouvelles routes de la soie », et la volonté du gouvernement chinois de construire un partenariat renforcé avec les pays africains, il devient crucial d’avoir une meilleure compréhension du continent, dans tous les domaines.

Patrick Sevaistre, conseiller du commerce extérieur français, a développé une expérience professionnelle de près de 40 ans avec l’afrique, et a récemment animé un séminaire organisé par Hec china, sur le thème du « doing business in africa », avant de donner une conférence à la chambre de commerce française, en partenariat avec Hec Paris et sciences Po (voir encadré). PourCHINAFRIQUE, il est revenu sur l’importance de la construction d'un partenariat durable entre la chine, la france et l’afrique.

Billard à trois bandes

La Chine est aujourd’hui le plus grand partenaire commercial de l’Afrique, avec des échanges qui ont atteint 150 milliards de dollars en 2016, tandis que les entreprises chinoises y ont investi, la même année, plus de 3,2 milliards de dollars. Les enjeux sont donc colossaux.

Sur le terrain, il faut garder à l’esprit que la France et la Chine sont confrontées aux mêmes déf i s, qu’ils soient économiques, politiques ou sécuritaires, comme la pauvreté, les infrastructures déf i cientes, le manque de travailleurs qualif i és, la mauvaise gouvernance, la corruption, l’instabilité politique ou encore l’activité terroriste. De fait, depuis 2013, un dialogue régulier a été établi entre agences françaises et chinoises– mais aussi entre acteurs privés – en vue d’identif i er les secteurs sur lesquels la coopération pouvait s’opérer. Et en juillet 2015, une déclaration a été signée par les Premiers ministres français et chinois, établissant un partenariat sur les marchés tiers. La tendance politique est donc au rapprochement. Un rapprochement qui devrait, selon nous, être fondé sur trois principes. D’abord, le rôle dominant des entreprises privées, avec le soutien des gouvernements, qui fourniraient la coordination et les conditions nécessaires à un climat d’affaires sain. Puis une coopération gagnantgagnant, où les avantages sont partagés avec l’Afrique af i n de développer les économies nationales et créer, par un effet de cercle vertueux, de nouvelles opportunités de marché. Et enf i n, la complémentarité, qui ferait de la réciprocité, de l’ouverture et de l’inclusion, des priorités.

Toutefois, cette coopération a ses limites. En effet, des deux côtés, très peu d’acteurs économiques ont pu bénéf i cier de cette collaboration, alors que certaines critiques restent tenaces. En raison de cela, la mise en œuvre effective d’un partenariat France-Chine en Afrique est fortement ralentie et, malgré la volonté politique, les entreprises françaises et chinoises ne travailleront ensemble que si elles ont intérêt à le faire.

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point dE vUE

HEC Paris

Fondée en 1881 par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris, HEC Paris est spécialisée dans l’éducation et la recherche en sciences de la gestion. En tant qu’institution académique de premier plan en Europe et dans le monde, HEC Paris offre une gamme complète de programmes éducatifs pour les dirigeants de demain.

Sciences Po

Depuis sa création en 1872, Sciences Po est une université mondialement reconnue dans les sciences sociales et humaines. Ouverte sur le monde, avec des étudiants provenant de 150 pays différents, l’école est également en partenariat avec de prestigieux établissements internationaux comme l’Université de Columbia, l’École d’économie de Londres, l’Université de Pékin, etc.

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Mais ces diff i cultés ont-elles réellement anéanti les chances d’une coopération fructueuse ? Nous ne le pensons pas. En effet, la Chine d’aujourd’hui n’est plus la Chine d’il y a 50 ans. Le pays a réussi à sortir 600 millions de personnes de la pauvreté et c’est une leçon précieuse pour notre approche sur le terrain. De plus, la majorité des Africains en ont une opinion favorable, tant en termes d’inf l uence que de sa contribution au développement du continent.

Il faut bien comprendre que la Chine et ses entreprises disposent de f i nancements massifs. Les français, eux, ont l’expertise, une technologie en avance et une meilleure connaissance de la façon de traiter avec des partenaires privés locaux. Il n’y a aucun problème de compétences sur le continent, seulement d’écosystème, et on ne peut occulter qu’une génération de Steve Jobs africains a émergé. Nous devons donc essayer de nous comprendre mutuellement et de percevoir que l’Afrique, c’est bien 54 pays aux tendances différentes.

Dans tous les cas, ces nouvelles évolutions sont très intéressantes, et peu évidentes à appréhender dans les faits. De nombreux préjugés restent à lever et tout cela ne peut se faire sans impliquer les Africains. En effet, il ne s’agit plus de réussirenAfrique, mais de réussirdansl’Afrique, contrairement à ce qui s’est fait pendant longtemps. La plupart des entreprises françaises ont compris la nécessité de cette approche inclusive et je rappelle souvent qu’on ne peut pas se contenter d’être des îlots de richesse dans des océans de pauvreté, car l’intelligence économique se joue sur le long terme.

À l’inverse, il faut changer nos mentalités concernant la Chine et continuer d’améliorer la perception des populations locales vis-à-vis des chinois en Afrique. En effet, lors de la première vague d’immigration, beaucoup de petites industries ont été littéralement balayées par les produits bon marché importés de Chine. Même si, dans un second temps, les choses se sont améliorées grâce à la construction de stades de football notamment, qui ont permis de diminuer la pression.

En parallèle, nous pourrions nous rapprocher de la diaspora africaine en Chine, pour l’aider à mieux s’organiser et favoriser l’interaction avec les entreprises chinoises, en jouant le rôle de médiateur. Nous pouvons aussi nous appuyer sur l’expérience des entreprises qui travaillent déjà ensemble en Chine ou en France, et qui sont plus enclines à collaborer en Afrique.

Au f i nal, si le bilan est contrasté, il reste globalement positif. Les Chinois ont fait de gros efforts d’adaptation et la diffusion de produits très compétitifs en Afrique, comme des téléphones ou des motos, fait que le continent vit à l’heure chinoise presque sans s’en rendre compte. De manière générale, il faut reconnaitre que sans leur présence, les pays africains ne connaitraient pas une telle croissance. À tel point d’ailleurs que le continent est aujourd’hui à la charnière : la population va doubler d’ici 2050 et l’urbanisation va atteindre 70 %. Les enjeux sont donc énormes et les acteurs économiques français, chinois et africains vont devoir être pragmatiques pour faire en sorte que cette croissance se passe bien. Cela passe plus de communication et la volonté de s’engager dans des partenariats fondés sur nos complémentarités de production, techniques et/ou f i nancières. CA