Plus qu’un simple outil
2022-06-18parHUANGLIZHI
par HUANG LIZHI
Huang Lizhi avec des artistes locaux pendant une cérémonie de rite de passage à Nkandla(Afrique du Sud), en janvier 2020.
L’auteure est diplômée du programme de doctorat conjoint entre l’Université de Pékin et l’Université Cornell. Elle étudie actuellement le zoulou à l’Université du Witwatersrand,en Afrique du Sud.
L’apprentissage d’une langue apporte une rencontre authentique et vivante avec le patrimoine culturel
Après avoir soutenu avec succès ma thèse de doctorat et obtenu un poste d’enseignante à l’Université des langues étrangères de Beijing, venir en Afrique du Sud pour étudier le zoulou était devenu mon nouvel objectif. J’ai toujours entendu dire que la maîtrise d’une langue et l’étude sur le terrain devraient être menées de pair, si les recherches abordant les relations internationales sont censées être exploratoires et respecter la réalité. En 2018, lorsque j’ai atterri à l’aéroport international Oliver Reginald Tambo de Johannesburg, j’étais animée par la même curiosité et le même romantisme qui ont stimulé mon imagination lorsque j’apprenais cette nouvelle langue.
À la rencontre de la population locale
La toute première leçon que j’ai apprise sur le zoulou à l’Université du Witwatersrand, à Johannesburg, était que l’apprentissage est une activité collective et joyeuse. Les enseignants des cours de niveau débutant ont fait de leur mieux pour rendre la classe aussi engageante et vivante que possible, les tâches de compréhension et de mémorisation impliquaient également les encouragements collectifs et le développement de l’amitié entre étudiants de la classe. Là, j’ai ressenti le cœur compatissant des étudiants locaux et j’ai acquis une meilleure compréhension de ce qu’est la joie mutuelle et partagée, qui est également devenue un sujet d’étude concret et vivant dans le cours de philosophie africaine en deuxième année.
Après avoir appris le vocabulaire de base, j’étais impatiente d’engager une conversation réelle avec des agents d’entretien, des bibliothécaires, des chauffeurs de taxi, des commerçants et tous ceux que je rencontrais sur le campus.Ils réagissaient généralement avec des sourires rayonnants, avant de m’aider à développer une meilleure compréhension de la langue. Tout le monde était ravi d’être mon professeur de langue.Je me souviens qu’un jour je suis entrée dans un magasin de bonbons,près de l’Université du Witwatersrand. La commerçante semblait très surprise de me voir tenir dans mes mains un journal en zoulou. J’ai alors commencé à parler avec plaisir de mon parcours. Elle était tellement intéressée par mon histoire qu’elle a décidé de la partager joyeusement avec ses collègues. En une minute,la petite boutique de friandises était remplie de rires, avec des clients qui s’approchaient de moi pour me demander plus de détails et qui par curiosité vérifiaient mon niveau de zoulou, à travers des petites conversations. Je n’oublierai jamais cette boutique et des encouragements passionnants que ces yeux authentiques ont injectés en moi, sources infinies d’inspiration et de joie pour apprendre cette langue.
Déconstruire les préjugés
L’apprentissage d’une langue est également un processus progressif pour éviter de perpétuer les préjugés culturels.Le « mythe zoulou » est un malentendu culturel typique. Le roi Shaka a fondé la nation zouloue, dans les années 1820. Il était expert dans l’amélioration et l’innovation des armes et a uni la nation zouloue sous son règne. Même les coloni
sateurs britanniques avaient peur de sa bravoure et de ses compétences guerrières. Dans les textes historiques, les Zoulous étaient souvent décrits comme redoutables et capricieux, créant un mystère exotique autour d’eux.
Huang Lizhi (troisième à gauche) avec de jeunes chercheurs des pays BRICS au Forum des jeunes scientifiques des BRICS,à Durban (Afrique du Sud), le 25 juin 2018.
En janvier 2020, mon ami m’a emmenée visiter l’ancien palais de Shaka qui est désormais un musée ouvert uniquement pendant la période creuse de l’agriculture. Nous avons eu beaucoup de chance de recevoir de la part du conservateur du musée les explications originales sur l’histoire du peuple zoulou.« En général, les peuples ont toujours une attitude profondément respectable envers le roi Shaka ! Nous lui sommes très reconnaissants pour l’unification de la nation et espérons sincèrement que l’Afrique du Sud deviendra encore plus forte et unie à l’avenir. »
Selon le conservateur du musée, le roi Shaka n’était pas seulement reconnu par ses capacités, mais surtout par un énorme emblème et patrimoine culturel pour toute l’Afrique du Sud. Le roi se nommait Shaka, nom faisant référence à une maladie de l’estomac, uniquement parce que sa mère n’était pas aimée par la famille royale. Les Zoulous ont apprécié les efforts déployés par le roi Shaka pour passer d’un enfant ignoré et abandonné à un chef fort. Il a énormément encouragé les Sud-Africains à surmonter les adversités dans leur vie.
Si je n’avais pas eu les opportunités de faire des visites et de recevoir des témoignages, je n’aurais probablement jamais été capable de discerner le vrai du faux dans le subtil discours colonial fabriqué sur le mythe zoulou, que je pourrais encore croire et considérer comme un pilier fort de la nation zouloue. Mais une visite sur le terrain a complètement bouleversé cette fiction coloniale et nous a montré les véritables échos de l’histoire zouloue dans le cœur des peuples. Cela souligne l’importance d’être sur le terrain pour dissiper ces fausses « connaissances » et les préjugés sociaux.
Un long voyage
Mon voyage dans la langue zouloue n’est pas encore terminé et il me reste un long chemin à parcourir avant d’atteindre une compréhension approfondie de cette culture. L’apprentissage d’une langue n’est pas simplement à des fins utilitaires de recherche, mais il s’agit aussi d’une rencontre authentique et vivante avec le patrimoine culturel. La langue est intimement liée à l’histoire et à l’état d’esprit. Les considérations historiques sont codées dans la langue elle-même.La structure sonore et morphologique a également façonné la perception des populations.
Ce voyage en Afrique du Sud a servi de prisme culturel inestimable dans lequel la passion du peuple sudafricain, sa bravoure et la lutte économique pour le développement en cours, sont fusionnées. Ce n’est que par l’apprentissage de la langue que j’ai pu entrevoir les véritables facettes du cœur du peuple sud-africain. Pour moi, la langue n’est pas seulement un outil ; c’est un tout. CA