La broderie (1)
2018-03-09parLisaCarducci
par Lisa Carducci
Dès la naissance, les bébés portent un bonnet brodé par leur grandmère, une tradition en train de disparaître. Celui-ci, que j’ai acheté au Shanxi à la fi n du siècle dernier, est à l’effigie du tigre, roi des animaux pour les Chinois ; c’est que le tigre porte au front trois lignes noires horizontales et une verticale, justement le caractère chinois 王, qui signi fi e « roi ». Ainsi, ce bonnet est censé protéger l’enfant des malheurs et lui conférer la force du tigre. On remarque aussi des chauvesouris, un autre symbole auspicieux.
En ce qui concerne les adultes,c’est surtout chez les ethnies minoritaires qu’on trouve des coiffes particulières.
Au Xinjiang, j’ai fi èrement porté le doppa tant que j’étais dans la région ouïgoure.
Les femmes kirghizes portent un bonnet tubulaire à plumes,et les hommes, un chapeau de feutre blanc. Mais on remarque toujours la broderie, qui n’est pas aléatoire : les points, les couleurs de fi l, le dessin, tout cela signi fi e quelque chose pour chaque ethnie.
En Mongolie intérieure,les modèles de coiffes sont nombreux et très attrayants. On les porte avec la robe mongole élégante, ainsi que des bottes de feutre, elles aussi brodées.
Les femmes salar du Gansu portent un voile de velours noir,brun ou vert foncé. Les motifs ne sont pas brodés à l’aiguille,mais obtenus par le rasage du velours selon un modèle dé fi ni.
Les femmes yi du Yunnan ont plusieurs coiffures compliquées, non brodées, mais le plastron qu’elles portent l’est abondamment.
Chez les Bai Ku Yao, littéralement « Yao aux culottes blanches », ce sont les hommes qui portent le vêtement traditionnel, un pantalon blanc légèrement bouffant, et serré entre le jarret et le mollet. Or, ce pantalon est retenu par une ceinture brodée dont les motifs sont signi fi catifs pour qui les connait.
Les femmes d’ethnie miao du Yunnan portent des jupes noires auxquelles elles ajoutent des « parures de jupe ». Dans la broderie, elles insèrent souvent de petites perles de verre coloré.
Les Tibétains font moins de broderie, mais ils expriment leurs légendes et talismans dans le tissage même.
D’une ethnie à l’autre, les gens peuvent se reconnaitre par le style et les motifs de leur broderie ou tissage. Le costume devient donc un grand livre ouvert sur la culture de qui le porte, alors que nous, ignorant ces symboles, ne pouvons que nous exclamer sur le travail fi n, la patience et l’imagination qu’exposent ces magnifiques broderies.
Outre les semelles intérieures dont nous avons déjà parlé, on trouve encore des animaux en tissu (jouets) brodés, les douze animaux du zodiaque chinois, et,surtout dans les régions d’ethnies minoritaires du sud, les« boules brodées ». Ces boules jouent un rôle essentiel dans le choix d’un partenaire de mariage, selon des traditions très différentes de celles des Han.
Chez les Yi et les Bai du lac Erhai, près de Dali, j’ai vu de magni fi ques porte-bébé, alourdis, pour le confort de l’enfant,par le rembourrage, et par la broderie pour l’éblouissement des yeux. Ce sont de véritables pièces d’art.
Tout ceci n’est qu’une porte entrouverte sur l’artisanat chinois. Je vous invite à poursuivre vous-mêmes votre recherche dans l’internet, les livres, et le voyage. CA