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Interprète :une passerelle linguistique et culturelle

2018-01-11EnoffrantlesmoyensdecommuniquerlestraducteursduisentlesdivergencesculturellesparLiXiaoyu

中国与非洲(法文版) 2017年8期

En offrant les moyens de communiquer, les traducteurs réduisent les divergences culturelles par Li Xiaoyu

EVRARD Ndayikeje est un technicien agricole

burundais. Depuis novembre 2015, iI travaiIIe en partenariat avec la mission chinoise présente sur place,qui apporte sa contribution dans différents domaines,dont la culture du riz.

Sur le papier, tout semble fonctionner. Mais problème : les experts chinois ne parlent que très peu l’anglais et le Burundi est un pays francophone.Heureusement, avec l’aide de Shi Li et Du Lanlan, deux traductrices chinoises d ’une vingtaine d’années, les choses sont tout de suite plus faciles. « Elles font tout leur possible pour que la communication soit aisée.Elles sont un rouage indispensable du processus »,rappelle Evrard, qui les considère désormais comme des amies. « Nous travaillons sur le terrain au quotidien. Cela crée des liens ! »

Chen Yangyang traduit une session de formation.

Trait d’union linguistique

Dès Ieur arrivée au Burundi en 2015, Ies deux jeunes traductrices sont confrontées à un déf i de taiIIe : Ia traduction du vocabulaire et du champ lexical agricole.« Je croyais bien connaître l’agriculture, parce que j’ai grandi à la campagne. Mais quand on la traite comme une discipIine scientif i que, c’est une tout autre chose »,avoue Du Lanlan. Dans leur équipe, les six experts chinois ont chacun leur spécialité, comme l’élevage et la riziculture. Les terminologies sont donc très diverses et très techniques. De plus, ce vocabulaire académique n’est pas forcément très employé au sein de la population, ce qui alourdit encore leur tâche. La seule manière pour les traductrices d’enrichir leurs références agricoles reste donc de communiquer en permanence avec les experts chinois et burundais.

En dépit de cela, elles ont chacune traduit près de 300 000 mots du chinois vers le français en moins de deux ans, depuis les dossiers de formation aux échanges de courriers, en passant par les rapports de recherche. Et cette tâche a principalement été réalisée de nuit, car généralement, on n’a pas accès à l’électricité dans la journée, en raison des coupures récurrentes.Et lorsqu’on leur demande la raison de cette opiniâtreté, elles répondent sans l’ombre d’un doute : « Ces documents sont un peu comme des manuels mis à la disposition des agriculteurs et des techniciens locaux,qu’ils peuvent utiliser pour chercher des solutions.C’est très gratif i ant de se sentir utiIe. »

Un melting pot d’échelle

À l’inverse, pour Li Xiaoming, interprète chinois de 33 ans, la terminologie est loin d’être sa première préoccupation. Dépêché à Djibouti en 2015 auprès de la mission de coopération agricole chinoise, après avoir travaillé au Niger et en Mauritanie, Li explique : « Les termes spécialisés ou techniques ne sont pas un problème de mon point de vue. On peut toujours se faire comprendre. Par contre, être l’intermédiaire de deux modes de pensée dictés par des cultures complètement différentes est un challenge quotidien... »

Et de citer un cas typique. « Il est arrivé qu’en plein milieu d’une importante analyse d’échantillons, les techniciens djiboutiens aient temporairement cessé de travailler pour se rendre à la mosquée. » Une action qui a semblé étrange aux yeux des experts chinois. Li a alors dû expliquer que la quasi-totalité des Djiboutiens étaient musulmans et qu’il était tout à fait normal pour les techniciens de s’arrêter pour prier.

« Dans des situations comme celle-ci, notre rôle consiste plutôt à servir d’amortisseur pour éviter des malentendus culturels », estime Chen Yangyang, qui travaille avec la mission chinoise au Mozambique depuis près de deux ans. Le traducteur en portugais de 28 ans se souvient encore de Ia diff i cuIté qu’iI a eu à expIiquer au chauffeur de la mission qu’il s’agissait d’un contrat« en freelance », payé en fonction des heures travaillées,et non par un revenu fi xe. « Dans ce cas-Ià, Ia diff i cuIté,c’est que l’on ne peut pas tout traduire, surtout les plaintes. Sinon, on risque de créer des malentendus et même de générer du conf l it. QueIquefois, en faire moins, c’est en faire plus », développe Chen, philosophe.« Notre rôle consiste alors à expliquer les impératifs de chacun pour essayer de trouver un compromis. » Un mois plus tard, Chen parvient à faire signer le chauffeur.

Réduire le fossé culturel

Dans leur quête de compréhension, les interprètes sont nécessairement de fi ns observateurs de Ia société.Li Xiaoming relate : « J’essaye d’envisager la société qui m’entoure sous divers angles, comme la religion qui a une place très importante ici. Ensuite, tout devient plus simple à comprendre. » De son côté, Chen Yangyang est en contact permanent avec Ies off i ces gouvernementaux locaux pour être informé de certaines règles administratives spécif i ques. « En un mot, pour mieux communiquer avec les habitants des pays dans lesqueIs nous travaiIIons, iI faut observer pIus et réf l échir davantage », ajoute Chen.

En parallèle, les interprètes ont aussi une responsabilité auprès des populations, pour permettre de lever certains doutes et mieux faire connaître la Chine. « Je réponds au quotidien à de nombreuses questions sur la Chine et les Chinois, et je les tiens informés de notre actualité », explique Chen. « Je suis persuadé que les jeunes générations communiqueront beaucoup plus facilement entre elles et se comprendront mieux. En attendant, j’essaye d’apporter ma pierre à I’édif i ce en servant de trait d’union. » CA