Une nouvelle vitalité
2018-05-11parGeLijun
par Ge Lijun
Le «New Retail» injecte un souffle de nouveauté dans le commerce de détail hors ligne et crée des opportunités d’emplois innovantes
Des consommateurs achètent des légumes dans le magasin Hema.
Pour Hao Xufeng, une résidente de Beijing de 25 ans, acheter des vêtements en ligne est déjà devenue une habitude de vie.
« C’est beaucoup moins couteux, mais ça entraîne aussi de nouveaux problèmes »,explique-t-elle, en ajoutant qu’elle doit souvent chercher longtemps des vêtements avant d’en trouver à son goût. Souvent, les vêtements qu’elles trouvent ne lui font pas.
Elle n’est pas la seule. À l’époque du e-commerce, ou du commerce en ligne,nous passons beaucoup de temps à sélectionner minutieusement des produits pour devoirfinalement les retourner aux vendeurs. De plus, Xufeng admet qu’elle n’achète jamais de produits alimentaires frais en ligne. « Lorsque je les reçois, ils sont déjà défraichis. Pour ma part, je préfère voir la viande et les légumes devant moi dans le magasin quand je les achète.C’est plus rassurant », dit la jeune femme.
C’est précisément pour régler ces problèmes que le « New Retail » est né, un concept proposé pour la première fois en octobre 2016 par Ma Yun (Jack Ma), le président du Groupe Alibaba. « Dans dix ou vingt ans, le e-commerce aura fait place au ‘New Retail’ », a-t-il lancé. Selon AliResearch, l’institut de recherche d’Alibaba,le « New Retail » s’articule autour de la construction d’un écosystème de vente fusionnant les canaux en ligne et hors ligne sur la base du big data, du cloud computing et de l’intelligence artificielle, en plaçant le consommateur au centre des préoccupations. Plutôt que de chercher à convertir les utilisateurs en ligne en clients hors ligne, ou vice versa, le géant du ecommerce Alibaba veut utiliser les données et la technologie pour enrichir le commerce de détail, y compris hors ligne.
Alibaba n’est pas le seul à vouloir « révolutionner » le commerce de détail chinois.Tencent, un géant de l’Internet chinois,JD.com, la deuxième plateforme de ecommerce en Chine, et Baidu, le plus grand moteur de recherche chinois, sont devenus des joueurs dynamiques sur ce nouveau front. En 2017, Alibaba et Tencent ont investi au moins 100 milliards de yuans (15,9 milliards de dollars) dans le commerce hors ligne.
Si tant de grands joueurs se réorientent vers le hors ligne, c’est en raison du goulot d’étranglement qui encombre le domaine virtuel. « Selon les données disponibles, le nombre de consommateurs en ligne actifs au quotidien était d’environ 500 millions en 2017. Le marché est saturé et il n’est plus facile de poursuivre la croissance. Il faut donc se tourner vers le hors ligne »,affirme M. Wang Youwei, professeur associé à l’Université Fudan de Shanghai.
Parmi ces tentatives, Hema, seule marque de magasins hors ligne d’Alibaba, est une grande réussite. Son premier magasin a ouvert ses portes en janvier 2016 à Shanghai et regroupe trois fonctions : supermarché,restaurant et marché aux légumes. Selon M.Hou Yi, PDG de Hema, depuis leur ouverture il y a six mois, les magasins ont tous réalisé des bénéfices, même si les prix sont relativement bas. « Les bas prix sont dus au fait que nous achetons directement de la source, ce qui réduit les intermédiaires »,explique M. Hou. Ce mode d’achat garantit la fraîcheur des produits, ce qui profite autant aux consommateurs qu’aux agriculteurs.
De nouvelles opportunités
Au cours des sessions annuelles de l’Assemblé populaire national (APN) et de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC) de 2018, le « New Retail »a fait beaucoup parler. Le député de l’APN M. Li Jun a visité un magasin de Hema à Beijing. Originaire d’un village de la province du Sichuan, au sud-ouest de la Chine,il s’intéresse à la façon dont le « New Retail » permettra aux citadins d’avoir plus de produits agricoles de bonne qualité à meilleur prix. En effet, il est favorable à l’industrialisation de l’agriculture. Grâce à son mode d’achat direct dans la région productrice et d’approvisionnement sans intermédiaire, il permet la normalisation des opérations, le renforcement de la marque et la traçabilité de la qualité en amont. « Ce nouveau mode de vente au détail o ff re de nouvelles opportunités à l’agriculture et aux villages », affirme M. Li, qui espère que le « New Retail » pourra développer un nouveau mode de coopération avec plus d’agriculteurs pour revitaliser les ressources des villages et enrichir les agriculteurs.
De nouvelles opportunités se présentent aussi dans le domaine des emplois. Selon un rapport du Département du travail et des ressources humaines de l’Université Renmin de Chine, Alibaba a créé en 2017 36,81 millions d’emplois, soit une augmentation de 6 millions par rapport à 2015. Cette croissance est due en grande partie au « New Retail ».
De plus, les magasins hors ligne ouverts par des entreprises d’Internet contribuent également à la création d’emplois. Par exemple, jusqu’à maintenant, Hema compte 40 magasins dans dix villes chinoises, ce qui stimule une nouvelle demande pour des talents dans les domaines de la formation,de la vente, de la logistique et de l’analyse des données. Selon le Rapport d’activité du gouvernement 2018, la Chine se propose de développer les nouveaux types d’emplois en utilisant « Internet Plus ». À ce titre, le « New Retail » joue un rôle utile.Dès novembre 2016, en fait, le gouvernement a publié un document sur l’innovation du commerce hors ligne qui mentionne l’émergence du « New Retail ». Ensuite en septembre 2017, le ministère du Commerce a mené une enquête sur le « New Retail »et a salué les expériences de Hema dans ce domaine.
« Quand un nouveau type de commerce émerge, le gouvernement peut jouer un rôle important. Alors que le ‘New Retail’ avance sur la route du développement, il ne doit pas se passer du guide et du soutien du gouvernement », conclut M. Zhang Jian,un expert de l’Association du commerce électronique de la Chine.