Le Malawifile un bon coton
2018-05-11parEdwinNyirongo
par Edwin Nyirongo
Avec l’ouverture d’une nouvelle usine de textile,le pays passera d’importateur à exportateur,faisant le bonheur des producteurs de coton
Le Président du Malawi,M. Peter Mutharika,dévoile la plaque de la société China-Africa Textile Co. à Salima,le 19 mars.
le Président du Malawi, M. Peter Mutharika, rêve depuis longtemps de transformer son pays en une puissance exportatrice. Or, il s’agit d’une tâche herculéenne, surtout considérant que le pays ne dispose pas de ressource minérale en abondance.
Or, ce rêve a pris des allures de réalité lorsque la société China-Africa Textile Co. a accepté d’établir une usine dans le district de Salima, au bord du lac Malawi. Ce projet de 80 millions de dollars permettra au Malawi de produire une large gamme de produits textiles, y compris des vêtements, destinés à l’exportation vers les États-Unis, l’Inde,la Chine et même certains pays africains.
« Nous faisons beaucoup d’efforts pour attirer des investissements étrangers directs dans le pays afin de créer plus d’emplois et de redresser notre économie », a déclaré M. Mutharika, qui a présidé la cérémonie de début des travaux de l’usine, le 19 mars.
Le président a d’ailleurs félicité la Chine pour avoir encouragé ses investisseurs à venir dans son pays. « La Chine a réalisé notre rêve de transformer le Malawi en une économie productrice et exportatrice. »
La première phase du projet devrait être achevée d’ici juin 2019, après quoi on estime que le projet devrait créer 1 500 emplois, ce qui est significatif dans un pays où le taux de chômage tourne autour de 7 %.
Selon le ministre de l’Agriculture, de l’Irrigation et du Développement de l’eau du Malawi, M. Joseph Mwanamveka, l’usine textile, en plus de créer des emplois, contribuera à stimuler la croissance de l’industrie cotonnière du pays, en créant une forte demande pour les producteurs de coton.
Le directeur de la société China-Africa Textile Co., M. Ju Wenbin, a souligné que la nouvelle usine nécessitera un investissement total de 80 millions de dollars, de source entièrement chinoise, divisé moitié-moitié entre la première et la seconde phase. L’usine générera des revenus en devises étrangères d’environ 36 millions de dollars par an pour le pays, selon lui.
China-Africa Textile Co. est une création conjointe des sociétés China-Africa Cotton Development Ltd. et Tianjin Tianfang Investment Holdings Co. Ltd. L’usine couvrira une superficie de 5,1 hectares avec une superficie totale des bâtiments de 18 000 mètres carrés abritant plus de 70 000 broches à tisser.
Bonne nouvelle pour les agriculteurs
Pour le producteur de coton Stephen Banda,40 ans, il s’agit d’une excellente nouvelle.Contrairement à de nombreux agriculteurs qui ont abandonné la culture du coton à cause de la faiblesse des prix, Banda a tenu bon, espérant que le vent allait tourner.
« Beaucoup de mes amis ont abandonné le coton par manque de marché. Les acheteurs nous o ff raient des prix trop bas. Pour ma part, même si cela me faisait mal, j’ai décidé de continuer, » dit-il. Il est maintenant certain de disposer d’un marché stable à des prix décents une fois que l’entreprise de textile ouvrira ses portes. Et il n’est pas le seul à se réjouir.
Le tabac est la principale source de revenus en devises étrangères du Malawi. Or,les campagnes antitabac à l’échelle mondiale ont entraîné une baisse importance de la demande, ce qui signifie des prix plus bas pour les producteurs. L’Association du tabac du Malawi est d’avis qu’en raison de la baisse des recettes, l’industrie est en besoin urgent de diversification.
Le fermier James Mwandira, originaire du district de Rumphi (nord), est d’accord.« Je cultive du tabac depuis 30 ans et j’ai pu me construire une bonne maison et acheté bien du bétail. Mais en raison de la baisse des prix, je me suis maintenant endetté et j’ai donc commencé à cultiver du coton. J’ai bon espoir qu’une fois que China-Africa Textile Co. commencera à produire,les choses iront mieux. »
M. Cosmas Lwanda, directeur général du Conseil du coton du Malawi (CCM), a déclaré à la Commission parlementaire sur l’agriculture que l’usine de textile allait revitaliser l’industrie du coton au pays.
La production de coton du Malawi est passée de 100 000 tonnes en 2010-11 à seulement 6 000 tonnes en 2016-17, selon les données du CCM. Les producteurs de coton devront hausser la production aux niveaux antérieurs afin de pouvoir approvisionner l’usine de manière optimale.
« L’usine contribuera à accroître la demande de coton et les agriculteurs devront relever ce défiafin de fournir des matières premières adéquates. Nous considérons cela comme une excellente opportunité pour les producteurs de coton du pays,qui disposeront bientôt d’un marché facile d’accès pour leurs produits du coton,dit M. Lwanda. Ils devront augmenter leur capacité à ajouter de la valeur, plutôt que d’exporter du coton brut. »
Une bonne initiative
L’ambassadeur chinois au Malawi, M. Wang Shiting, dit que le projet d’usine de textile aidera le Malawi à augmenter ses exportations. « Cet investissement contribuera sans aucun doute à la croissance du Malawi et surtout, améliorera les revenus des populations locales. »
La relation sino-malawite se trouve à un nouveau point de départ historique, selon l’ambassadeur. « Nous sommes prêts à faire des efforts pour mettre en synergie l’initiative des ‘Nouvelles Routes de la soie’avec la Troisième Stratégie de croissance et de développement du Malawi (MGDS III) »,dit-il, faisant référence à la stratégie de développement national conçue pour réaliser les aspirations de développement du pays.
L’économiste malawite Felix Jumbe décrit le coton comme une culture ayant des effets multiplicateurs sur l’économique du pays. « Le coton a été l’une des principales sources de devises étrangères pour le pays ;mais dernièrement, sa contribution a diminué en raison d’une mauvaise gestion.[L’usine] sera en mesure de stimuler la production, car elle nécessitera 100 000 tonnes de coton [par an], achetant ainsi pratiquement tout le coton produit au Malawi. Cela signifie qu’environ 200 000 producteurs bénéficieront en approvisionnant l’usine »,explique M. Jumbe.
Malgré cette bonne nouvelle, M. Jumbe souligne que l’approvisionnement en électricité demeure un problème majeur pour attirer des investisseurs étrangers au Malawi. Les usines hydroélectriques du pays ne génèrent pas suffisamment d’énergie pour répondre à la demande. Le gouvernement malawite se penche présentement sur d’autres sources d’énergie. Certains experts ont même suggéré un projet d’interconnexion électrique entre le Malawi et le Mozambique, ce qui permettrait au pays d’avoir accès au marché énergétique de l’Afrique australe.
« Le gouvernement essaie d’augmenter la capacité électrique du pays et nous espérons que les choses vont bientôt se normaliser.L’énergie est un facteur clé pour attirer des investissements sérieux », dit-il.