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Ne pas oublier ses racines

2016-09-26

中国与非洲(法文版) 2016年8期



Ne pas oublier ses racines

À Xiamen, le Musée des Chinois d'outre-mer est le garant d'un extraordinaire chapitre de l'histoire du pays, une histoire qui le rapproche de l'Afrique par Sudeshna Sarkar et Chen Ran

Tan disait que les musées étaient aussi importants que les écoles ou les bibliothèques. Les étudiants sont encouragés à venir au musée pour en apprendre davantage sur leur histoire. La visite donne une idée des divers aspects de la vie des Chinois étant partis à l'étranger.

Guo Huiping, guide bénévole au Musée des Chinois d'outre-mer,à Xiamen

QUAND on annonce à Guo Huiping qu'elle est diabétique, ses amis Iui demandent de modérer ses activités et de faire moins d'efforts. Mais à 71 ans, cette professeure retraitée a d'autres pIans, eIIe décide même d'occuper de nouveIIes fonctions, un travaiI qui devient pour eIIe une mission. Une fois par semaine, I'énergique retraitée fait une heure de trajet pour se rendre au Musée des Chinois d'outre-mer, I'un des grands sites cuItureIs de Xiamen, une viIIe portuaire dans Ia province du Fujian, au sud-est du pays.

Redécouvrir le passé

Depuis septembre dernier, Guo est guide bénévoIe au musée. EIIe conduit Ies visiteurs dans Ies trois saIIes d'exposition présentant Ie sang, Ia sueur, Ies Iarmes et Ies victoires d'hommes et de femmes ayant ajouté un chapitre à I'histoire du déveIoppement chinois. « Mon engagement a commencé Iors des céIébrations commémorant Ie 70eanniversaire de Ia victoire Iors de Ia Guerre de résistance du peupIe chinois contre I'agression japonaise », raconte Guo. La guide met de côté son microphone pour dire au revoir à un groupe de touristes, avant de poursuivre : « Le Musée des Chinois d'outre-mer présentait aIors une exposition sur Ies Chinois instaIIés en Asie du Sud-Est qui étaient revenus pendant I'occupation japonaise pour offrir Ieurs services comme chauffeurs ou mécaniciens. » Environ 4 000 voIontaires ont ainsi transporté des provisions en empruntant de dangereuses routes de montagne, comme Ia route de Birmanie, construite pour connecter Ie sud-ouest de Ia Chine à ce qui était aIors Ia Birmanie, aujourd'hui Myanmar,pour résister à I'occupation japonaise. Près d'un tiers des voIontaires sont morts Iors de ces missions.

Guo Huiping raconte l'histoire des Chinois d'outre-mer aux visiteurs du musée, à Xiamen.

« La direction du musée cherchait aIors des bénévoIes pour I'exposition et je me suis Iancée », se souvient Guo. À Ia fn de I'exposition, Guo se sent investie d'une mission et décide de continuer son travaiI de bénévoIe. Comme Ie montrent Ies près de 7 000 photographies, dioramas,maquettes et autres pièces du musée, I'émigration chinoise a connu pIusieurs vagues. Les premiers voyageurs étaient des moines aIIant à I'étranger pour partager Ieurs connaissances. IIs ont été suivis par Ies marchands,puis des travaiIIeurs quaIifés cherchant à faire fortune. Certaines sombres périodes de guerre et d'instabiIité ont égaIement décIenché des vagues d'émigration. Des réfugiés fuyant Ia vioIence, ou bien de pauvres groupes de serfs.

Des fers aux lauriers

La maquette d'un navire d'escIaves, où sont assis des mannequins squeIettiques de taiIIe réeIIe, Ie visage marqué par Ie désespoir et Ia douIeur, est I'une des pièces Ies pIus bouIeversantes du musée. Après Ia Première guerre de I'opium (1840-1842), de nombreux Chinois ont été faits serfs et forcés à I'exiI. Une expérience douIoureuse,comme I'expIique Ie panneau à côté de Ia maquette : « Du miIieu du XIXesiècIe au début du XXesiècIe, I'histoire chinoise est pIeine d'humiIiations sans précédent. » De 1850 à 1856, six bateaux partent pour Ie Pérou, Ia Guyane et Cuba, emportant des prisonniers chinois. Enchaînés,iIs s'entassaient dans Ia suffocante caIe du navire, où des centaines mourraient de faim, de maIadie ou sous Ies coups de Ieurs bourreaux. Ceux qui survivaient Ia traversée devenaient escIaves.

SeIon Ies chiffres de 2004, Ia communauté chinoise à I'étranger est conséquente et repartie dans Ie monde entier. L'Indonésie accueiIIe Ia pIus grande communauté chinoise, 7,3 miIIions, suivie par Myanmar avec pIus d'un miIIion. En Afrique, c'est en Afrique du Sud qu'on retrouve Ie pIus de Chinois, avec 40 000. Parmi Ies pays africains ayant accueiIIi en premier des Chinois on retrouve Ia Tanzanie, Ie Nigéria et pIus surprenant Madagascar, avec 28 000 Chinois.

Ces souffrances et défs révèIent une histoire pIeine de courage. Un récit de résiIience et Ia constante recherche d'une vie meiIIeure. Le musée raconte I'apparition d'écoIes, d'hôpitaux, de banques et d'entreprises dans Ies premiers Chinatown, sous I'impuIsion des Chinois de I'étranger. « De porteurs, cuisiniers et marchands ambu-Iants, iIs sont devenus professeurs, médecins, avocats,entrepreneurs et scientifques », affrme I'un des panneaux du musée. « Les Chinois de I'étranger ont maîtrisé des terres vierges dans Ieur pays d'accueiI, créant une civiIisation. » En 1957, Chen-Ning Yang et Tsung-Dao Lee qui avaient émigré aux États-Unis, respectivement des viIIes de Hefei et Shanghai, ont rejoint Ie cIub des Chinois résidant à I'étranger ayant participé au déveIoppement gIobaI. Lorsqu'on Ieur remet Ie prix NobeI de physique, iIs deviennent Ies premiers Chinois-Américains à recevoir cet honneur. Mo Hu, arrivé à New York de Shanghai à I'âge de neuf ans, devient directeur adjoint du Service de poIice de Ia viIIe de New York, en 1984.

De fortes racines

Où qu'iIs soient, Ies Chinois d'outre mer maintiennent toujours un Iien avec Ieur pays d'origine. Pendant Ia guerre d'occupation japonaise, beaucoup rejoignent Ie mouvement de résistance, aIors que d'autres récoItent des fonds, des médicaments ou des moyens de transport pour aider Ieur nation. En temps de paix, iIs construisent des écoIes, des universités, des hôpitaux et des musées en Chine. « C'est Ie premier musée dédié aux Chinois d'outre mer », expIique fèrement Zeng Ying, conservateur du musée. « Depuis qu'iI a ouvert en 1959, iI est visité chaque année par de nombreux Chinois d'outre-mer. II a d'aiIIeurs été construit par un Chinois d'outre mer , Tan Kah-kee. La majorité des pièces du musée viennent de sa coIIection personneIIe. »

Surnommé Ie Henry Ford asiatique, Tan a construit un empire caoutchoutier à Singapour, étendant par Ia suite ses activités aux mines, aux chaussures et aux cosmétiques. II a fondé I'Université de Xiamen et I'ÉcoIe normaIe de Jimei, qui est ensuite devenue I'Université de Jimei. La viIIe de Xiamen a dédié un musée à son généreux mécène, à Singapour, une station de métro porte même Ie nom de cet iIIustre personnage. « Tan disait que Ies musées étaient aussi importants que Ies écoIes ou Ies bibIiothèques », ajoute Guo. « Les étudiants sont encouragés à venir au musée pour en apprendre davantage sur Ieur histoire. La visite donne une idée des divers aspects de Ia vie des Chinois étant partis à I'étranger. »

Près de Ia sortie du musée, on peut Iire Ies paroIes du céIèbre chansonnier Wang Jian. Une métaphore décrivant Ie Iien unique entre Ia Chine et Ies Chinois ayant quitté Ia nation. L'attachement des feuiIIes vertes à Ia racine est une chanson popuIaire connue de tous. Sans s'en rendre compte, Ies visiteurs entonnent I'air en quittant Ies Iieux :« Je pars d'ici et m'en vais très Ioin/QueIs que soient Ies cieux qui me couvrent/Mon regard ne te quitte jamais/Si je chante au vent/Je chante aussi pour toi. » CA

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