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Espoir depuis longtemps

2015-11-10FrancoisEssomba

中国与非洲(法文版) 2015年3期

Espoir depuis longtemps

Bakassi attend son envol économique par François Essomba

REvENUE officiellement sous le giron camerounais en août 2008, la presqu'île de Bakassi manque toujours cruellement d'infrastructures, malgré les efforts du gouvernement et une croissance économique rapide.

Située dans le sud-ouest anglophone du Cameroun, la presqu'île de Bakassi s'étend sur une superficie de 1 000 km2et compte une population d'environ 75 000 personnes. Le conflit armé qui a opposé dans les années 1990 le Cameroun et le Nigéria pour le contrôle de ses richesses pétrolières et halieutiques s'est résolu en faveur du Cameroun. Une décision de la Cour internationale de justice(ClJ) en 2002 a en effet conduit au transfert de souveraineté vers le Cameroun lors des accords de Greentree en 2008.

Cet événement majeur a été bien accueilli dans la presqu'île et par la population camerounaise. Cependant, l'enthousiasme semble faiblir à Bakassi,où le développement des infrastructures inscrit dans les accords de Greentree tarde à voir le jour. Lors de ces accords, le Cameroun, ainsi que plusieurs pays occidentaux dont l'Allemagne, la Grande Bretagne, la France et les États-Unis, s'étaient engagés à financer des projets d'infrastructures pour un coût total de 500 millions de dollars.

Un progrès insuffisant

Un progrès notable a été enregistré dans les domaines scolaire, sanitaire et sécuritaire. Sur le plan sécuritaire, la confiance est de retour au sein de la population depuis que la sécurité est assurée par le Bataillon d'lntervention Rapide (BlR), une unité d'élite réputée pour avoir éradiqué la piraterie aux larges des côtes camerounaises. Le gouvernement camerounais a également réhabilité et construit une centaine d'écoles et de centres sanitaires, et quelques opérateurs du secteur privé ont commencé à investir dans ces secteurs.

Des efforts restent cependant à faire, notamment dans le domaine des transports, du développement agricole, de l'électrification et de l'accès à l'eau potable.

Pour Kingsley, un enseignant vacataire de Bakassi, le manque d'infrastructures est encore flagrant, et décourage les enseignants professionnels. Les écoles sont donc souvent obligées d'avoir recours à des bénévoles. Selon Elizabeth lselle Bekomba, maire de Mundemba, la région manque encore cruellement d'infrastructures. « Le manque de centres de santé oblige certains patients de notre localité à se rendre au Nigéria voisin pour les cas de maladies graves, affirme-t-elle. Les difficultés d'accès à l'eau potable causent aussi beaucoup de maladies au sein de la population. »

Selon un autre membre de l'équipe municipale,les installations d'eau potable datent des années 1990, alors que la population a triplé depuis cette période. ll indique également que la région souffre d'un déficit d'infrastructures de communication et d'information. Un émetteur de la chaîne publique Cameroun Radio and Television (CRTV) a en effet été installé mais n'a jamais été mis en marche. Le manque de suivi par les autorités camerounaises concerne également les projets d'infrastructures de transport : un réseau routier construit entre les communes de lsanguelé, Mundemba, Ekondo Titi et Kumba attend toujours le bitumage depuis 2011.

Le manque de centres de santé oblige certains patients de notre localité à se rendre au Nigéria voisin pour les cas de maladies graves. Les difficultés d'accès à l'eau potable causent aussi beaucoup de maladies au sein de la population.

Elizabeth Iselle Bekomba, Maire de Mundemba

La manne pétrolière

Le pétrole nourrit de grands espoirs de développe-ment au sein de la population de Bakassi. Selon le maire d'Ekondo Titi, James Messembe Nyando, la région pourrait tirer profit de ses ressources pétrolières, encore largement sous-exploitées.

À Kitta Balué, une autre commune de Bakassi,des experts avaient indiqué dès 1984 que les puits de pétrole disposaient de quantités importantes pouvant aller au-delà de 50 ans d'exploitation. Cependant, la population attend toujours la mise en exploitation de ces puits. En attendant les retombées de la manne pétrolière, l'activité dominante de ce village demeure la culture du manioc et d'autres tubercules, ainsi que la production cacaoyère.

Cependant, les habitants de Bakassi craignent que les ressources pétrolières locales profitent plus aux compagnies occidentales et au gouvernement camerounais qu'à la population. Beaucoup de jeunes souhaiteraient être prioritaires dans le recrutement du secteur pétrolier, mais ils sont rarement entendus.

Ainsi, à lsanguélé, l'une des localités de Bakassi,les compagnies pétrolières Kosmos Energy et Addax se préoccupent peu des besoins de la population. « J'ai voulu parler à l'un des responsables de Kosmos Energy, mais ce dernier m'a fait savoir qu'il ne discuterait pas avec la population, il traite directement avec le gouvernement du Cameroun », nous a confié Kingsley.

Une tenancière d'une buvette dans le village Dikome-Balue

Le Chief Mokube Joseph Bokwe Augustine, autorité traditionnelle de Dikome-Balue

Des solutions appropriées

Le gouvernement a prévu d'investir 500 millions de dollars dans plusieurs secteurs clés afin de remédier aux carences en infrastructures de Bakassi.

Un rapport de 300 pages a été publié par le Comité de coordination et de suivi des projets prioritaires à réaliser dans la zone de Bakassi, et présenté à la presse. Destiné à la fois aux administrations camerounaises et aux bailleurs de fonds, il préconise la construction de routes, la mise en place effective des services administratifs et de commissariats de sécurité publique, ainsi que la création d'écoles et de structures sanitaires.

Pour les rédacteurs du rapport, la construction des infrastructures de transport nécessite à elle seule 300 millions de dollars, notamment pour le bitumage d'une route de 250 km reliant les communes de Kumba et d'Akwa.

Le rapport préconise également de consacrer 130 millions de dollars à la création d'une Ecole normale d'lnstitut de l'enseignement Général (ENlEG)pour pallier le manque d'enseignants. 50 millions de dollars devraient aussi être investis dans le tourisme,notamment à travers l'inventaire et l'aménagement des sites touristiques, la construction d'un complexe hôtelier à Akwa et la construction d'un port de plaisance.

Enfin, le rapport appelle à la construction d'une antenne de relais des signaux de Télévision et Radio à Ekondo Titi et Mundemba, ainsi qu'à la construction d'une station de radio à Akwa, ldabato ou lsanguélé, afin de contrebalancer l'influence des médias nigérians dans la région. CA

(Reportage réalisé à Bakassi)