Zhou Ande : pionnier de l’innovation du train sur voie métrique
2016-10-26DANGXIAOFEImembredeladaction
DANG XIAOFEI, membre de la rédaction
Zhou Ande : pionnier de l’innovation du train sur voie métrique
DANG XIAOFEI, membre de la rédaction
Sur la voie ferrée métrique de Kuala Lumpur, capitale de la Malaisie, un train roule à 160 km/h, il s’agit du train à multiples unités motrices (MUM) sur voie métrique le plus rapide du monde. Tout le monde trouvera sûrement cette vitesse assez banale, puisqu’on s’est habitué au TGV roulant à plus de 300 km/h. Pourtant, c’est bel et bien la plus grande vitesse du monde atteinte par un train MUM sur voie métrique.
De nos jours, l’écartement standard des rails est en général de 1 435 mm, alors que la voie métrique dispose, elle, d’un écartement de 1 000 mm. En Malaisie, l’écartement des rails de la majorité des chemins de fer actuels n’est que d’un mètre, ainsi le train MUM roule sur voie étroite d’une manière comparable à une personne qui courrait un 100 m sur une poutre. Ainsi, assurer la stabilité et le confort au cours de la circulation à grande vitesse est une entreprise vraiment difficile en matière de R&D.
Zhou Ande, un des inventeurs de ce type de rames, est responsable du département de R&D du système des trains MUM de la CRRC Zhuzhou Locomotive Co., Ltd (CRRC-ZELC). Durant ses vingt ans de carrière, il a toujours poursuivi l’objectif de faire en sorte que le train arrive rapidement à sa destination et en toute sécurité. Mais en ce qui le concerne, l’innovation n’arrive jamais à son terminus.
En quête de son rêve
Quand notre journaliste s’est rendue à la CRRC-ZELC, berceau du train MUM sur voie métrique le plus rapide du monde, M. Zhou était en train de tester le système de traction de la rame automotrice sur voie métrique dans une chambre isolée. Ce laboratoire reflète son travail acharné et témoigne de la concrétisation de son rêve envers ce type de train.
En 1958, l’Usine de locomotive électrique de Zhuzhou (actuelle CRRC-ZELC) a fabriqué la première locomotive électrique du pays, baptisée plus tard « Shaoshan », très prometteuse aux yeux de tout le monde à l’époque. Des années plus tard, de nombreux journaux abordaient encore la légende de la « Shaoshan », alors que l’attention du public demeurait focalisée sur elle. Né dans les années 1970 au Hunan, Zhou Ande a grandi en écoutant cette histoire, ce qui a suscité son désir d’étudier la locomotive électrique. Une graine de rêve s’est ainsi enracinée silencieusement.
En raison de son intérêt pour la locomotive électrique, il a choisi la traction électrique comme spécialité à l’université. En 2000, une fois diplômé de l’Université des communications du Sud-Ouest de la Chine, il a commencé à travailler à l’Usine de locomotive électrique de Zhuzhou, située dans la province du Hunan. Cette entreprise, qui porte désormais le nom de CRRC-ZELC, se consacre à la fabrication de locomotives électriques, de véhicules de transport ferroviaire urbain, de trains MUM interurbains, de trains à sustentation magnétique et de véhicules ferroviaires usant de nouvelles technologies.
À son entrée dans l’entreprise, il lui a été confié le poste de responsable du service technique après-vente du projet de chemin de fer Guangzhou-Shenzhen. C’était son premier contact avec la rameautomotrice. Avec la fabrication innovante du « Lanjian » et sa mise en service sur la voie ferrée Guangzhou-Shenzhen, puis avec le « China Star » qui roulait à 321,5 km/h, soit le train MUM le plus rapide de Chine à l’époque, Zhou Ande a accumulé de bonnes expériences en R&D.
Cependant, sa recherche a rapidement pris un tournant important. Avec le lancement du programme sur les agglomérations urbaines et le développement du transport urbain de passagers, Zhou Ande a dirigé sa recherche vers les trains MUM interurbains. Cela a établi les bases de la R&D pour la mise au point de l’unité automotrice sur voie métrique la plus rapide du monde. « À ce moment-là, la Chine avait déjà conçu et fabriqué le train MUM à grande vitesse, mais la recherche sur la circulation sur ligne interurbaine était un tout nouveau projet. À la différence de la ligne à grande vitesse, le train MUM interurbain est mis en service comme un moyen de transport public sur courte distance et avec une grande capacité de transport », a expliqué M. Zhou.
Grâce à des années d’exploration et d’innovation, Zhou Ande a finalement rencontré l’opportunité de concrétiser son rêve. En 2010, la CRRC-ZELC a signé un contrat de 4 milliards de yuans avec la Malaisie pour une commande de trains MUM interurbains. Trente-huit rames automotrices pour voie métrique y ont été exportées, il s’agit de la première commande de trains MUM interurbains à traction électrique chinois pour l’étranger. La conception d’ogives, la forme carénée, le style islamique et la décoration intérieure inspirée de celle d’un dôme ont attiré beaucoup d’attention.
À la fin du premier projet en 2013, la Malaisie a immédiatement passé une seconde commande auprès de la CRRCZELC. S’appuyant sur leurs expériences de recherche et de fabrication de rames automotrices interurbaines, Zhou Ande et ses collègues ont inventé le premier train MUM sur voie métrique du monde.
Zhou Ande discute avec ses collègues sur le projet de train MUM sur voie métrique le plus rapide du monde en Malaisie.
Résoudre les problèmes techniques épineux
Zhou Ande se souvient que s’être vu confier les tâches de recherche et de fabrication lui a infligé une lourde pression. En effet, il fait vraiment chaud en Malaisie, avec plus de 35°C tout au long de l’année et il y a un taux élevé d’humidité en raison de sa situation à proximité du littoral. De plus, la partie malaisienne a requis une température intérieure régulée à environ 20°C, ce qui soumet le système de climatisation à de plus grandes exigences.
« Sans technologie parfaite, l’eau issue de la condensation du climatiseur jaillirait sans cesse dès que le train roulerait », a-t-il fait remarquer. Face au défi, il a dirigé son équipe vers la recherche d’une innovation technique afin d’améliorer la capacité de réfrigération, de déshumidification et d’évacuation d’eau, parvenant ainsi à satisfaire la demande du client.
Auparavant, pour les anciennes rames malaisiennes, il se produisait des coupures de courant lors du passage en zone de ralentissement à cause d’une mauvaise distribution de l’alimentation. Le peuple malaisien souhaite désormais bénéficier d’une meilleure expérience dans le train. Zhou Ande a ainsi adopté une technique d’alimentation s’appuyant sur un convertisseur principal et un convertisseur auxiliaire intégré afin d’assurer la production d’électricité par le micro freinage lorsque le train passe en zone de ralentissement. Cela a permis non seulement le fonctionnement continu du climatiseur, de la lumière et de la télévision lors du passage en zone neutre, mais aussi la reproduction de l’énergie par le freinage, faisant ainsi des économies d’énergie considérables.
En raison de la grande capacité de transport de cette ligne interurbaine, cette rame à six unités motrices acheminera plus de 1 200 personnes, ce qui représente un autre défi pour Zhou Ande. En outre, le train opère de manière intensive, avec des arrêts toutes les 7 à 15 minutes. « C’est un grand défi pour le système de propulsion et le bogie. »
Après de longs jours et de longues nuits de travail, les experts en R&D de l’équipe de Zhou Ande ont fini par aboutir à une innovation dans le monde, le stationnement sur distance de moins de 800 m en une demi-minute à l’aide du freinage de roue en utilisant un bogie sur voie métrique. « En comparaison avec l’ancienne rame, nous avons inventé un bogie plus léger et plus serré en plus d’une capacité de freinage et une stabilité accrues », a présenté M. Zhou. Selon lui, le bogie joue un rôle de châssis en guidant le chemin d’un véhicule, soutenant les rames et assurant l’amortissement du choc.
Zhou Ande a évoqué qu’ils ont recouru à l’aluminium allié léger afin de réduireconsidérablement le poids de la rame. Par ailleurs, le train ne prend que deux minutes pour monter de 0 à 160 km/h. En plus d’en assurer la sûreté, ils l’ont équipé d’un système d’alarme de température de l’essieu, d’un stabilisateur horizontal et d’un système de surveillance de l’état à l’extérieur de la rame au cours de la circulation à grande vitesse.
Tout en innovant sur plusieurs technologies avancées, ils ont également prêté une grande attention à l’incorporation des éléments culturels malaisiens. Par exemple, il existe des wagons spéciaux destinés aux femmes et des salles où les Musulmans peuvent faire leur prière en dépit d’un long trajet.
« Notre réussite s’explique par l’innovation technologique », a résumé M. Zhou. À son avis, celle-ci fonctionne comme le système hématopoïétique d’une personne. « Sans ce système, on ne pourrait survivre. De même, sans l’innovation technique, la coopération entre CRRC-ZELC et la Malaisie ne pourrait porter ses fruits de manière si conséquente », a-t-il ajouté.
Pour répondre aux besoins de davantage de clients, selon Zhou Ande, il faut innover sans cesse quant aux performances techniques des produits. « La technologie et les produits chinois sont au même niveau que ceux des géants étrangers, mais les performances techniques de nos trains répondent mieux aux besoins des clients », a-t-il commenté. Dans la communauté internationale, certains pensent que les TGV chinois ont imité la technologie étrangère, or selon Zhou Ande, leurs trains ont adopté le standard européen le plus avancé au monde associé au standard de l’Union internationale des chemins de fer. Allant de la conception et l’essai en passant par la fabrication, l’ensemble du train a passé les certifications tierces. Dans le test de fonctionnement sans obstacle sur 10 000 km, la rame automotrice sur voie métrique a décroché un record mondial avec une vitesse de 176 km/h.
CONFIANCE
La confiance a renforcé, à son tour,la coopération. Actuellement, la CRRC-ZELC a fourni des produits en matière de transport ferroviaire représentant plus de 80 % du marché malaisien.
Un train MUM interurbain en gare de Kuala Lumpur, capitale de la Malaisie.
Se développer à l’étranger
Par méconnaissance, au moment où Zhou Ande est arrivé en Malaisie, des habitants locaux se sont montrés surpris : « La Chine n’est-elle pas un pays arriéré ? Pourquoi alors nous vend-t-elle des rames automotrices ? » Zhou Ande s’est ainsi aperçu que le développement des trains chinois à l’étranger a un long chemin à parcourir.
Au début de la coopération, les deux parties s’examinaient avec attention. « Quand il y avait un petit problème lors du test du train, la partie malaisienne se souciait de ce que les produits chinois n’avaient pas les qualités requises », s’est-t-il rappelé. Ce qui l’a marqué lorsqu’une incompatibilité et une perturbation du signal sont apparues alors que le train roulait sur la voie ferrée malaisienne, c’est que la partie malaisienne a immédiatement craint que ce soit un problème avec le train.
Afin de résoudre ces problèmes techniques, Zhou Ande et les techniciens se sont rendus sur place pour examiner le circuit d’alimentation électrique sur rails et ils ont fini par trouver les causes de l’anomalie : l’endommagement ou la perte des lignes de retour en cuivre avaient causé un dysfonctionnement du courant électrique et des perturbations du signal. « Il fait vraiment chaud en Malaisie. Nous avons marché le long du chemin de fer pour chercher ces lignes endommagées ou perdues afin de les réparer », a-t-il ajouté. Aucune perturbation du signal n’a été notée suite à la réparation, les rames automotrices roulent normalement sur la voie ferrée. Grâce à ces anecdotes, les produits chinois ont gagné la confiance de la partie malaisienne.
La confiance a renforcé, à son tour,la coopération. Actuellement, CRRCZELC fournit des produits en matière de transport ferroviaire représentant plus de 80 % du marché malaisien. Trois filiales de la CRRC-ZELC se sont implantées en Malaisie, où 90 % des employés sont malaisiens.
Outre la Malaisie, CRRC-ZELC a engrangé des commandes de locomotives, de métros, de métros légers et de trains MUM dépassant les 30 milliards de yuans, en provenance d’une dizaines de pays, tels que Singapour, la Turquie, l’Inde, l’Afrique du Sud, la Macédoine ou encore l’Éthiopie. À l’heure actuelle, leurs produits sont exportés vers 101 pays et régions. Tous ces fruits sont le résultat de l’innovation.