Une dévaluation modérée du yuan
2015-11-09WuZhigang
Une dévaluation modérée du yuan
L'économie chinoise bénéficiera d'une dévaluation modérée du yuan par Wu Zhigang
COMME la Réserve fédérale des États-Unis (Fed),tenant compte de sa reprise économique, retire progressivement sa politique d'assouplissement quantitatif, le dollar américain entre dans un cycle de croissance continue de ses taux d'intérêt. Sa réévaluation deviendra une tendance inévitable. Dans ce contexte, la monnaie chinoise, le yuan, subira une plus grande pression à la dévaluation. En fait, en raison de facteurs internes et externes, il est temps que le yuan soit modérément dévalué. Une dévaluation modérée de la monnaie chinoise sera non seulement bénéfique à la reprise économique du pays, mais contribue aussi à la croissance de ses Bourses de catégorie A.
Des facteurs externes affaibliront forcément le yuan. Alors que le dollar devrait s'apprécier avec l'augmentation de ses taux d'intérêt, la zone euro et le Japon continuent de mettre en œuvre une politique monétaire souple,conduisant à l'affaiblissement de l'euro et du yen.
Le 23 juillet, le FMl a émis un avertissement selon lequel la réévaluation continue du dollar américain résultant de l'écart creusé entre les États-Unis et les autres principales économies en matière de politique monétaire pourrait exercer un impact négatif considérable sur d'autres pays. Dans son rapport annuel, le FMl affirme que la baisse des prix du pétrole, la relance monétaire dans la zone euro et au Japon, ainsi que de fortes anticipations de relèvement des taux d'intérêt aux États-Unis et au Royaume-Uni ont créé un environnement de « spillover-rich ». La dévaluation des monnaies autres que le dollar poussera les capitaux à abandonner les marchés émergents pour embrasser le marché américain, accentuant la pression à la dévaluation du yuan.
Des facteurs internes font aussi barrage à un yuan plus fort. Le taux de change d'un pays est en grande partie déterminé par sa productivité. Or, avec l'accroissement des coûts de la main-d'œuvre, les salaires augmentent plus rapidement que le PlB en Chine, conduisant au déclin de sa productivité. En théorie, les campagnes d'entrepreneuriat et d'innovation lancées par le gouvernement chinois devraient contribuer à la croissance de la productivité, pourtant, les effets de cette politique ne se font pas encore sentir.
Une dévaluation modérée du yuan est nécessaire pour stimuler le commerce extérieur chinois, miné par la faiblesse des demandes externes et internes.
Bien que le PlB chinois ait connu une croissance de 7 % au premier semestre de cette année, le problème de surcapacité n'est pas encore complètement résolu. Durant cette période, le profit total des entreprises industrielles ayant un chiffre d'affaires principal estimé à plus de 20 millions de yuans (3,12 millions de dollars) s'est élevé chacun à 2 840 milliards de yuans (458 milliards de dollars),soit en baisse de 0,7 % en glissement annuel. Depuis le début de cette année, le gouvernement chinois a mis en avant plusieurs stratégies de développement, telles que « lnternet Plus » et « lndustrie 4,0 », pour pousser la croissance économique.
Le concept « lnternet + », présenté par le Premier ministre Li Keqiang en mars dans son Rapport d'activité du gouvernement, vise à intégrer l'lnternet mobile, l'infonuagique, les données massives et l'lnternet des objets avec la fabrication moderne pour créer un nouveau moteur de croissance. La stratégie « lndustrie 4,0 », lancée en collaboration avec les autorités, des institutions de recherche et des entreprises allemandes pour développer des usines « intelligentes » entièrement automatisées, est également appelée nouvelle Révolution industrielle.
Mais ces stratégies ne sont pas encore devenues de réels moteurs de croissance.
ll faut du temps pour que le pays ajuste sa structure économique et développe de nouveaux points de croissance. Les difficultés de sa transformation économique sont incontournables. Afin de maintenir une croissance stable, la banque centrale de Chine a abaissé ses taux d'intérêt et les taux de réserves obligatoires (TRO) à plusieurs reprises dès l'année dernière. ll est donc impossible que le yuan se maintienne.
Une dévaluation modérée du yuan est nécessaire pour stimuler le commerce extérieur chinois, miné par la faiblesse des demandes externes et internes. Dans les six premiers mois de 2015, le total du commerce extérieurchinois a atteint 11 530 milliards de yuans (1 802milliards de dollars), en baisse de 6,9 % en glissement annuel, avec les exportations s'élevant de 0,9 % et les importations baissant de 15,5 %. Au cours de cette période, son commerce bilatéral avec la zone euro et le Japon s'est contracté respectivement de 6,8 % et de 10,6 %, indiquant les grandes difficultés connues par les exportateurs. Ces difficultés s'expliquent par la faiblesse de la demande externe et l'appréciation trop élevée du yuan, qui a causé la perte de l'avantage lié aux bas prix des exportations chinoises.
Une dévaluation modérée du yuan permettra de dynamiser les bourses chinoises de catégories A
En raison de ces facteurs, le yuan se trouve confronté à une pression croissante à la dévaluation. La dévaluation de la monnaie chinoise est-elle bonne ou mauvaise ? À mon avis, une dévaluation modérée du yuan contribuera à relancer son économie interne ; par conséquent, ses avantages l'emportent sur ses inconvénients.
À l'intérieur, l'insuffisance des demandes, la diminution des nouvelles commandes et la croissance des coûts de main-d'œuvre ont restreint le rebond économique. ll est donc nécessaire d'assouplir la politique monétaire pour stimuler la croissance. L'abaissement de ses taux d'intérêt et des TRO par la banque centrale visait à injecter des liquidités dans le marché monétaire et à baisser les coûts de financement pour les entreprises dans le contexte d'un ralentissement économique. Avec des liquidités suffisantes sur le marché interne, il est peu probable que le yuan reste fort face à d'autres monnaies. D'autre part, une dévaluation modérée du yuan peut permettre aux exportateurs chinois de baisser les prix de leurs marchandises.
En outre, la dévaluation du yuan et l'abaissement des taux d'intérêt rendent les dépôts bancaires moins attractifs et les investissements en action plus intéressants. Un rebond des prix immobiliers est peu probable en raison des stocks considérables. Le marché immobilier est par conséquent peu favorisé par les investisseurs. Par contre,le marché boursier sera un objet d'investissement préféré. Bien que la baisse du cours des actions depuis la mi-juin jusqu'à début juillet ait surpris beaucoup d'investisseurs, la récente stabilisation du marché due à l'intervention publique attirera davantage d'investisseurs. L'injection de nouveaux capitaux permettra de renforcer un marché boursier vulnérable.
Après avoir connu plusieurs années de tendance haussière, les Bourses américaines vont probablement entrer dans un stade d'ajustement du marché, notamment après le resserrement de la politique monétaire américaine par la Fed. Si les Bourses chinoises de catégorie A peuvent maintenir leur tendance haussière,on assistera au flux massif de capitaux internationaux sur le marché, ce qui est favorable à l'internationalisation des Bourses chinoises de catégorie A et du yuan.
Une dévaluation modérée du yuan donnera indubitablement une nouvelle impulsion au marché boursier et permettra de maintenir une tendance haussière.
ll reste à savoir quelle dévaluation est modérée. Selon moi, si on abaisse le taux de référence du yuan face au dollar tout en maintenant un taux de change stable face aux principales monnaies autres que le dollar, comme l'euro, la livre et le yen, une telle dévaluation doit être considérée comme modérée. CA
(Il s'agit d'un extrait édité d'un article rédigé par Wu Zhigang, un commentateur financier, et publié dans Securities Times)